Lélia et le voyageur (fin)
Chapitre 3
Depuis ce soir-là, Lélia gardait toujours la plume sur elle. Elle l’avait accrochée à un fil rouge qu’elle portait autour du cou, bien cachée sous ses habits. À chaque fois que le silence devenait lourd dans la maison, à chaque fois qu’elle sentait l’ombre des voix sévères derrière elle, elle touchait la plume… et un vent doux se levait dans son cœur.
Mais les jours passaient, et le voyageur ne revenait plus.
Du moins, c’est ce qu’elle croyait.
Car chaque matin, juste avant l’aube, une nouvelle fleur apparaissait près du vieux puits, toujours la même : une fleur de lumière, aux pétales bleus et jaunes, qui brillait doucement même dans la brume. Lélia comprit : il était toujours là, mais il se cachait.
Un soir, elle décida de faire quelque chose qu’elle n’avait jamais osé : elle écrivit un mot.
Elle prit un vieux papier, y dessina une petite main serrée dans une grande, et écrivit en bas :
Je n’ai pas oublié. Ma main te cherche toujours.
Puis, sans bruit, elle sortit, les pieds nus sur les dalles froides, et glissa le mot dans le tronc creux d’un vieux chêne, là où elle sentait le vent tourner.
Cette nuit-là, elle rêva.
Dans son rêve, elle était plus grande, plus forte. Elle courait sur une route entourée d’arbres, et à ses côtés marchait une silhouette familière. Le voyageur. Mais cette fois, il portait une cape d’encre et un regard grave.
— Le temps vient où tu devras choisir, Lélia, dit-il doucement.
— Choisir quoi ?
— Entre écouter les voix… ou suivre l’appel. Ton appel.
Elle voulait demander plus, mais le rêve s’éteignit comme une chandelle dans le vent.
Le lendemain matin, dans le tronc du chêne, à la place de son mot, il y avait une feuille blanche. Mais quand elle la toucha, des mots invisibles apparurent, tracés par le vent :
Je t’ai entendue. La suite t’attend. Garde la plume. Suis la lumière.
Commentaires
Enregistrer un commentaire